samedi 19 décembre 2015

Sur les pas de Robert...

Depuis le début de notre voyage, nous sommes intrigués par ce qui fut l'une des plus grandes expériences sociales de l'histoire qu'a connu l'Amérique latine, à savoir les missions jésuites. Ça tombe bien, notre itinéraire passe par Misiones, la province au sol rouge, située tout au nord-est de l'Argentine et qui doit son nom aux missions jésuites qui la parsèment. Trente ruines de missions jésuites des Guaranis peuvent ainsi être visitées sur la zone frontalière entre l'Argentine, le Paraguay et le Brésil. Des missions jésuites existent également dans l'est de la Bolivie, elles s'intéressaient quant à elles aux communauté de Chiquitos.
C'est ainsi que pendant un siècle et demi à partir de 1609 que les jésuites ont fondé dans des régions isolées des missions, aussi appelées réductions, où ils ont installé des communautés de Guaranis afin de les évangéliser et de les éduquer, tout en les protégeant de l'esclavage (des bandes armées brésiliennes lançaient régulièrement des raids afin de capturer des esclaves pour les plantations de canne à sucre) et des travers de la société coloniale. Les jésuites se sont intéressés à la culture des Guaranis en apprenant leur langue, sans leur imposer la langue espagnole, et en s'adaptant à leur organisation sociale et en instillant les principes catholiques pour changer quelques coutumes comme la polygamie ou le cannibalisme. Chaque famille, devenue monogame, recevait une maison et les enfants étaient scolarisés. Tous les habitants de la mission étaient apparemment libres et pouvaient donc la quitter pour vivre une autre vie s'ils le souhaitaient.
En règle générale, une mission s'organisait autour d'une grande place, dominée par une église, le colegio, la résidence des prêtres et le cabildo, une sorte de conseil municipal où vivait le chef choisi par les Guaranis, qui gérait leurs affaires internes. Mais bien évidemment, la direction de la mission restait entre les mains des prêtres, une sorte de démocratie dirigée... Les maisons des Guaranís, disposées en rangées, occupaient le reste de l'espace. Avec le développement des missions, de magnifiques églises baroques ont ainsi vu le jour, rivalisant de beauté avec celles construites en Europe.
Ces communautés étaient autosuffisantes. Les Guaranis avaient appris l'agriculture et chaque famille labourait sa propre terre et une terre commune destinées aux veuves et femmes abandonnées, la CSG avant l'heure. Les Guaranis ont adopté l'art et la musique qu'on leur enseignait, et en mêlant le style européen au leur, ils ont créé un nouvel art qui se manifesta à travers de magnifiques scultuptures, peintures et autres musiques. Les communautés avaient également leur propre armée pour se défendre des attaques. A leur apogée, les missions jésuites des Guaranis comptaient 100 000 Guaranis.
En les privant d'une main d'oeuvre corvéable à merci, autant dire que les jésuites ne se sont pas fait beaucoup d'amis auprès des autorités coloniales espagnoles et portugaises... Suivant l'exemple du Portugal et de la France, Charles III finit par bannir les jésuites des territoires espagnols en 1767. Avec le départ des prêtres, les communautés se sont délitées et sont reparties vivre en nomades dans la forêt. L'abandon, les guerres se sont alors chargés de leur destruction progressive.
Vous nous connaissez, loin de nous l'idée de faire l'apologie des jésuites. Mais, nonobstant cette manie de l'évangélisation, cette utopie de faire passer l'homme avant le profit est suffisamment exceptionnelle pour être saluée.

Après les explications, passons aux visites. Tantôt sous un soleil de plomb, tantôt sous des trombes d'eau, nous avons visité les ruines de deux missions.

La première a été San Ignacio Miní. Fondée en 1611 au Brésil puis abandonnée suite à des attaques de marchands d'esclaves, la mission s'établie sur son site actuel en 1696 et a fonctionné jusqu'à l'expulsion des jésuites. Jusqu'à 4000 Guaranis y ont vécu. Les ruines de cette mission sont les plus complètes. Les restes de l'église sont tout simplement superbes.
      
Malgré la belle couleur de la pierre, l'église était peinte en blanc
      
    
  




Les missions du Paraguay seraient parmi les plus belles et les mieux conservées. Qu'à cela ne tienne! Nous avons donc traversé la frontière pour découvrir ces trésors.

Construite en 1712, Trinidad serait la plus grande de toutes les missions jésuites. Contrairement aux missions argentines, beaucoup d'éléments décoratifs ont résisté dans la mission de Trinidad. Les ruines de l'église sont ici grandioses.

Au loin, l'église
        
Des restes de maisons de Guaranis

Nous aimons pas trop beaucoup ça, nous préférons quand c'est un peu trop plus moins gris...
    




Piégé par la pluie


En version européenne
En version guarani
Après cette première visite, nous devions visiter les ruines de la mission Jesús de Tavarangüe situées un peu plus au nord. Une pluie torrentielle est venue perturber nos plans. Nous sommes donc vite rentrés dans notre pays depuis un mois, l'Argentine.
Cette petite escapade au Paraguay a tordu le coup aux idées reçues que nous avions. Nous pensions en effet que ce pays était sans intérêt alors qu'en réalité, il recelle bien des beautés naturelles; le tout sans le moindre touriste à l'horizon et des niveaux de prix assez dérisoires. Mais vu les efforts fournis par les autorités en matière de développement touristique, on vous fiche notre billet que les jours tranquilles du Paraguay sont plus que comptés!

Et Robert dans tout ça? Il s'agit d'un clin d'oeil au film Mission qui relate les derniers jours des missions jésuites. Il a été tourné dans le national d'Iguazu, et son personnage principal, le prêtre Rodringo Mendoza est justement interprété par un certain... Robert de Niro!

Certes, le titre est un peu tiré par les cheveux mais une chose est sûre: ces visites nous ont donné envie de revoir cet excellent film... enfin après l'épisode VII de Star Wars!


Pour finir, des photos insolites pour les Européens que nous sommes:


Mais qu'est-ce que c'est que cette histoire? Il fait chaud, nous sommes en short et ils nous mettent les décorations de Noël !
 


1 commentaire:

  1. Ah bravo, on s'absente quelques jours et paf ! Trois articles à lire d'un coup !!!
    Pas très sérieux pour un Lundi matin tout ça !!
    En tout cas merci pour l'instant culturel, les infos sur les missions jésuites ont éclairé ma semaine !!

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